Avec plus de 800 000 euros de budget et l’engagement de 450 chevaux, le Jumping 4* de Canteleu est un événement d’envergure en Normandie où l’organisation, le sponsoring et l’investissement local jouent un rôle crucial. Dans cette interview, Elise Grandjacques Van Colen, organisatrice de l’événement, dévoile les coulisses de ce jumping international et les défis de financement, de logistique et de partenariat qui en assurent le succès.
Pégase Daily : Comment sont réparties les charges sur un jumping international comme le jumping 4 étoiles de Canteleu ?
Elise Grandjacques Van Colen : Pour chaque jumping, il y a un budget événement, comprenant une partie dépense et une partie recette. Du côté des dépenses, on retrouve les coûts liés au président de jury, aux juges étrangers, aux juges, aux stewards, aux vétérinaires, au maréchal-ferrant ainsi qu’à toute l’équipe de piste. Cela représente un poste humain très important. Surtout que pour cette édition du 4 étoiles de Canteleu, nous avons plus de 100 postes en simultané.
Les autres dépenses incluent la partie technique (sonorisation, éclairage) et la partie logistique (machines, entretien, essence). Il y a une multitude de dépenses comme pour n’importe quel événement, incluant les charges comme la location de tentes, l’espace VIP, la moquette, les fleurs, etc.
D’un autre côté, pour compenser ces dépenses, il y a les revenus de l’événement. Cela comprend les engagements de chaque participant (plus le nombre de chevaux est important, plus le chiffre d’affaires l’est aussi), le sponsoring, et les contributions de nos partenaires publics et institutions. Dans notre cas, la région Normandie, la métropole Grand Normandie, le département de Seine-Maritime et la ville de Canteleu nous soutiennent. Ensuite, il y a les partenaires privés, qui sont nombreux, et nous avons toujours besoin de nouveaux partenaires pour compenser les dépenses et contribuer à la réussite de cet événement.
Quel sont les coûts d’un jumping 4 étoiles comme le vôtre ?
Cela dépend du lieu, de l’organisation et des activités prévues. En général, le budget d’un CSI 4* varie entre 1 million et 1,5 million d’euros. Plus on investit dans l’événement, notamment en communication, plus il faut des partenaires conséquents pour accompagner l’événement.
En ce qui nous concerne, cela est beaucoup moins pour plusieurs raisons. Nous faisons beaucoup de choses nous-mêmes. Nous n’avons pas de frais de location de site car il nous appartient. Aussi beaucoup d’éléments sont en place du fait que nous sommes organisateur de plus de 100 événements par an. Aujourd’hui, cet événement représente environ 800 000 euros tous frais confondus. L’objectif est d’augmenter le budget, car nous voulons faire encore mieux, avec plus de décoration et de communication, en visant un budget d’un million d’euros à l’avenir.
Comment le jumping se rémunère-t-il pour faire face à toutes les charges ?
Tout d’abord, il est obligatoire d’avoir 450 chevaux engagés sur nos épreuves. Si nous n’atteignons pas ce nombre, le budget devient un peu juste. Ensuite, nous comptons sur les partenaires, qui sont essentiels pour subventionner les épreuves ranking et les grands prix. En échange, nous leur offrons de la visibilité.
Le sponsoring des entreprises est très important dans l’événementiel sportif. Quelles sont les opportunités pour les entreprises sur le jumping 4 étoiles de Canteleu et à quel coût ?
Les coûts sont très variables. Quand je rencontre les partenaires, nous montons un projet ciblé en fonction de leur secteur d’activité. Par exemple, nous faisons des propositions différentes pour une marque automobile comme Defender et pour Optical Center. Chez nous, on peut tout réaliser sans contrainte. Nous proposons, entre autres, de vendre une épreuve avec un naming sportif pour de la visibilité, des couvertures aux couleurs des marques lors des remises des prix, des invitations pour les collaborateurs ou clients des partenaires, des tables VIP, ou des cocktails. Nous assurons aussi une communication via nos réseaux sociaux et notre newsletter, ainsi que de la visibilité sur la piste avec des obstacles aux couleurs des marques. Nous composons avec chaque partenaire selon ses besoins et ses envies.
Aujourd’hui, vous investissez dans de nouvelles infrastructures comme les boxes en dur. Comment priorisez-vous les investissements pour votre développement ?
Les investissements sont planifiés pour au moins cinq ans après leur construction. Par exemple, avec la construction du manège. Nous avons déjà 208 boxs en dur et cela ne suffit pas. Sur nos 100 jours d’événement par an, même pour les événements nationaux, j’ai toujours 300 boxs occupés. L’objectif est donc de construire 100 boxs supplémentaires rapidement pour en avoir 400 en dur. Ces boxs sont une vraie force et un confort primordial pour les chevaux. Nous avons refait les pistes avant le jumping pour répondre aux exigences élevées d’un 4 étoiles et impressionner les cavaliers par leur qualité. Un bon concours repose sur la qualité des boxs et des sols, et nous travaillons dans ce sens en remerciant tous ceux qui nous soutiennent.
Selon vous,les politiques et les territoires ont-ils conscience de l’intérêt d’infrastructures comme Equi-Normandie sur leur territoire ? Quel est votre discours pour les convaincre ?
Je les convaincs grâce au travail réalisé par toute l’équipe. J’espère que nous les convainquons par notre notoriété, le public que nous touchons et la qualité des cavaliers que nous recevons. Je ne sais pas s’ils réalisent l’impact de notre sport sur le territoire, mais je défends nos chiffres, comme le nombre d’hôtels remplis, les restaurants fréquentés, et les nombreux camions branchés durant les compétitions. Nous avons la chance d’attirer beaucoup de monde, et je souhaite que notre site privé puisse rivaliser avec un site public, malgré des financements moindres.
Vous organisez plusieurs événements équestres tout au long de l’année. Qu’est-ce que cela représente pour le territoire ?
Effectivement, nous ne sommes pas un événement unique d’un week-end, nos installations sont pérennes. Pour convaincre les institutions publiques de nous soutenir, nous leur montrons que cet événement vitrine est le plus haut niveau que nous réalisons, mais nous organisons 100 jours d’événements par an. Cela permet de préparer les chevaux et les cavaliers d’avenir, en offrant des compétitions de toutes catégories. Par exemple, les cavaliers du 4 étoiles peuvent avoir l’impression de courir la coupe du monde, et la semaine suivante, nous organisons le championnat départemental poney et club. C’est une chance pour ces jeunes cavaliers de monter sur les mêmes pistes que les grands champions, ce qui les tire vers le haut. Nous sommes passionnés de sports équestres et aimons aider à former chevaux et cavaliers.
Le saut d’obstacles est très présent à Equi-Normandie, prévoyez-vous d’autres disciplines ici ?
Bonne question. Nous avons introduit le dressage en début d’année avec la création du manège, et nous souhaitons découvrir d’autres disciplines. Nous nous orientons également vers le horse-ball et une date sera bientôt annoncée pour cette discipline.